toune d'automne

« Vivre de débuts, beaucoup de fins inévitables. »

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Lui de nuit, moi de jour, on faisait rien que se manquer. J’avais essayé de m’adapter, de pu dormir. De suivre sa cadence, de m’éreinter, de garder les yeux ouverts, d’en prendre soin. Donnant-donnant, ça existait pas tant, non.

Juillet j’me levais en me demandant pourquoi, c’tait la routine qui embarquait. Première affaire je faisais c’était de checker si y m’avait pas texté pendant la nuit par mégarde ou par envie. Souvent y’avait rien, rien que des notifs futiles pis des bouts de sa soirée éparpillés pour tout le monde en général mais jamais pour moi en particulier.

Mes boîtes étaient enfin défaites, j’habitais la métropole. Faire l’épicerie, cuisiner, manger, refaire l’épicerie. Le cercle de la vie de locataire. Faire le ménage, se lâcher lousse une couple de jours, recommencer.

« T’as pas le droit de recommencer sans moi. »

Sorry, j’avais pas le choix Hubert. Ma soundtrack de l’été. Passer les nuits entières dans mon salon à broder des cossins sur des sacs en papier, devoir me rappeler que je devais pas minimiser mes efforts avec des synonymes rabaissant. Je faisais de l’Art. Toujours travailler plus pour moins penser à toute, produire, consommer, rouler pour pas se sentir lâche de juste vivre. Survivre. Aller au travail en pensant que c’est the only path viable. Acheter du lait d’amande en pack de quarante au Costco, I just won at life haven’t I.

Lui de nuit, moi de nuit. Pas l’choix.

Je m’ennuyais. Mon cerveau voulait vivre dans son mood. Une odeur pis un bruit ambiant, une toune douce pis son respire. Ses soupirs. De contentement. On était ben, souvent. Odeur de lavande, de sueur. Nos derniers moments qui planaient encore dans l’air. Qu’on fasse semblant. Des mots en suspens, on s’embrassait pour rien dire. Y lichait ses lèvres, je soupirais dessus, contrastes. Lumières tamisées, goût de nicotine pis de cyprine. Rifts de guitare pas clairs, la tête vide ben l’fun.

On créait l’insomnie ensemble, on devenait comédiens.

On empilait les cafés, mochas, biscuits, becs à trois heures du matin. En culotte pis en t-shirt, de la musique franco en arrière si c’était pas un docu plate. Toune d’automne en été, avec lui j’entendais la pluie dehors même s’il faisait beau. Chaque fois qu’il me demandait de passer la nuit, feeling de pédago flashback 2010. Juste les matins seules, après, qui étaient raides avec mes restes de rêves dans ‘bouche. J’avais pu envie de me lever, j’me recouchais sur le côté pis j’pensais à lui. J’pensais à lui pis à ses mains un peu, j’me demandais ce serait comment d’me réveiller avec elles sur moi. Ses doigts qui descendent le long des miens, qui agrippent ma taille,

caressent mes seins.

Cette nuit-là j’avais quand même rêvé à toi, étendu avec moi, qui me disait à quel point tu trouvais le lit confortable.


On s’était croisé quelque part où on aurait pas dû. Ça adonnait toujours qu’on aboutissait à la même place, sauf y’était tout l’temps pressé. Le temps filait de son bord pourtant la vie le mettait sur mon chemin. Pour me tease on dirait, pour me faire plaisir de temps en temps peut-être. Mes mots étaient vides parce que ma tête était pleine pis toute se bousculait. Ce qui sortait de ma bouche faisait pas de sens parce que pourquoi y’était là pis j’étais là mais on était trop loin pis j’avais le goût de pleurer mais aussi le goût de sourire jusqu’à éclater ma mâchoire mais j’voulais qu’il éclate son corps sur le miens pour qu’on fasse de l’art pis qu’il oublie ses obligations parce qu’on rajeunissait pas pis là c’était le temps de faire semblant de s’aimer pour vrai. Je les prenais toujours occupés ou solitaires comme si j’aimais ça pas être une priorité. J’en cherchais peut-être un occupé qui ferait de la place pour moi. Problème d’égo. Un constant besoin d’être spéciale, mais pas pour n’importe qui. Je choisissais ceux qui avaient mieux à faire, une carrière, des amis, des responsabilités, une vie, une blonde à aimer. Je me plaçais tout de suite deuxième pour mériter la première place. Fucking virgo. J’en prenais qui avaient pas besoin de moi, pour créer un manque. Chimiste. J’avais besoin de faire mal pour me sentir bien. J’avais besoin d’avoir mal pour être heureuse. Poète. Le soleil qui faisait perler quelques gouttes sur mon nez, un écouteur qui pendait de mon oreille l’autre qui blastait les Cowboys un peu trop fort, mes livres neufs dans les mains, dès qu’il eut tourné le dos pour partir je l’avais regardé comme si c’était pas vrai des mots encore au bord des lèvres parce j’avais pas réussi à tout dire en si peu de temps. Flash. On prend une photo de moi avec le mur de briques en background, c’est donc beau Montréal. J’ai jamais su si on voyait la détresse dans mes yeux, ou si mon cœur battait au travers ma minuscule camisole d’été.

J’avais tu l’air heureuse, les mains pleines.


Grosse déprime d’après simili-amour. J’aimais donc ça les petits frissons au début, apprendre à se connaître, les balbutiements d’un je-sais-pas-quoi. Mais vivre de débuts, c’était beaucoup de fins inévitables. J’haïssais les fins. It never ends, qu’a disait pour se consoler. Trop peur que ça arrête, que ça s’oublie, que ça existe pu pis qu’y ait aucunes traces nulle part. It never ends, un gros mensonge pour les nostalgiques. Pour les écriveux de bout de napkins, pour les peureux pis les menteurs. Mentir à moi-même, j’étais pas capable ben longtemps. Fucking ascendant.

Over analysing, over thinking, pas encore over you tho.

Arracher mes cils comme les pétales d’une fleur juste pour occuper mes mains. Je me décomposais pis c’était plus fort que moi. Je vivais dans une constante polarité, à vouloir que tout le monde me veuille mais vouloir personne, à aimer l’été juste avec la clim pis à détester l’hiver si j’avais pas assez de couvertes. À vouloir que tu me textes, mais pas trop parce que j’ai peur de l’engagement. À vouloir rencontrer du monde mais pas sortir de chez nous.

Déprime d’hiver, mais en été. Avoir les blues. Ma couleur préférée.

T

A

S

Googler déprime saisonnière pour voir si ça se peut que le trop de soleil me joue dans la sérotonine, pas m’avouer que je suis juste à tendance dépressive tout court. I got power, poison, pain and joy inside my DNA. I got hustle though, ambition, flow, inside my DNA. I was born like this, since one like this. Google disait que si je déprimais en été y’avait pas de remède sauf same old antidépresseurs et psychothérapie. Ça disait de baisser les lumières, hibernation. Vivre dans le noir, ok. Fermer les lumières, les rideaux, les yeux. Dodo. Deux-trois siestes par jour, étais-je assez chatte 2.0.

I got dark, I got evil, that rot inside my DNA

I got off, I got troublesome, heart inside my DNA

J’avais envie de mourir. La vie était plate d’un coup. Pas assez de bons moments, j’obtenais jamais c’que je voulais. J’étais tannée de brailler, tannée de me sentir mal aimée ou pas aimée pentoute. J’étais tu’ seule, même en public. Tu’ seule en foule. Tu’ seule avec les collègues, les amis, la famille, les voisins de blocs, les étrangers dans ‘rue, avec la boîte de DMs pleine. J’me sentais juste pas seule quand j’étais remplie, quand mon puzzle était comblé, quand je me faisais prendre pis des fois regarder dans les yeux. Je savais pas quel syndrome j’avais, quel cliché j’étais. J’étais tannée de courir après des réponses de passer mes soirées à espérer un come over ben sec pis d’être déçue de la personne qui l’envoyait. Je pouvais pas me contenter de ce que j’avais j’avais l’impression de rien avoir mes jours étaient vides mes nuittes étaient longues j’écoutais la musique du voisin d’en haut pour me rappeler que la vie continuait, par boutes c’tait comme si elle s’arrêtait, à force de le souhaiter trop fort peut-être. Tannée d’avoir le goût de pogner en feu de fantasmer sur la fin de jouir sur le noir profond dans lequel je me pâmais. La vie à un fil. Lol oué oué it never ends.

Y’était tu trop tard pour rencontrer quelqu’un qui allait tomber amoureux de moi, j’avais peur que t’aies été ma seule chance. Mon âme sœur. C’était tu ok de pas passer sa vie avec? J’allais tu rencontrer quelqu’un de mieux que toi? Me résigner tranquillement à vieillir single parce que ceux que je voulais se passaient de moi trop facilement. J’empilais les rejets pis les défaites, j’essuyais mes larmes du revers de la main en étendant au passage toute mon makeup. I don’t want to see you later. Je m’habillais ben comme si t’allais m’inviter à sortir, le soir j’enfilais un beau déshabillé comme si t’allais sonner à ma porte. J’avais le goût de pitcher des doubles de clés pour que peut-être je dorme pas toute seule à soir. Tannée de me faire appeler pour de l’affection pis jamais me faire flatter les fucking cheveux. Bing bing, on me prenait fort, ça jute, après bye. L’amour c’tait trop compliqué même si c’tait pas censé. Pis je voulais pas être en amour anyways.

Tell me when destruction gonna be my fate

Gonna be your fate, gonna be our faith

Peace to the world, let it rotate

Sex, money, murder—our DNA

Je voulais juste qu’on pense pas à demain.

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