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« Les choses que j’avais pas eu le temps de te dire. »

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Septembre était apparu comme si rien était arrivé. Comme si tout était comme d’habitude. Septembre était arrivé comme si j’allais rentrer à l’uni finir le BAC que j’avais lâché, comme si j’allais retourner à l’appart te donner un bec pour dire allo pis comme si on venait tout juste de fêter ma fête au chalet avec mes parents. Sauf là septembre était arrivé mais avec rien de toute ça. Y’était arrivé avec des vents chauds, la peur du vide pis des shifts à n’en pu finir parce que c’tait le temps de l’année où ça brassait pas mal à ‘job.

Septembre était aussi arrivé avec de quoi auquel j’m’aurais jamais attendue. Une rencontre. Une envie de sortir du lit, quelqu’un à coller. Quelqu’un pour qui cuisiner, à flatter, avec qui se promener dans HOMA les mains enlacées. Je savais pas si toi ça t’aurait fait capoter ben raide de me voir de même, mais moi ça me faisait penser de plus en plus à toi. Fort. Ça gossait. Je voulais pas que tu saches, je voulais pas que t’apprennes par mégarde que je nous avais abandonnés. J’avais pas encore compris qu’en fait c’était toi qui voulait pu de nous, j’avais vraiment rien compris encore. Ça fait que j’aimais, mal. J’aimais en pensant à toi. J’aimais en me sentant mal de nous. J’aimais en m’ennuyant. J’aimais pas pour vrai, dans l’fond.

Dormir de moins en moins souvent chez moi, partager une partie de ma vie avec quelqu’un qui était pas toi. Quelqu’un qui avait envie de savoir ma journée, qui voulait un peu me coller, qui me partageait sa vulnérabilité. C’était peut-être trop d’un coup, j’avais pas su gérer.

J’aimais ses cheveux roux pis sa mâchoire. Ses mains pis ses t-shirts pastel. J’aimais son sourire pis son aise.

Quelqu’un de tellement différent de toi que je savais même pas comment être moi. Une tempête dans un verre d’eau. Des opposés. Des pôles différents qui me faisaient me poser trop de questions.

Tout ce qu’il faisait me rappelait ce que tu faisais pas, et vice versa. Pas moyen d’arrêter d’y penser. Des fois, fermer les yeux et imaginer être dans ta chambre. Imaginer que c’était tes spasmes qui me réveillaient dans la nuit, pas ouvrir les yeux pour continuer le mensonge. Chercher ton odeur dans tous les recoins, comparer vos vêtements, la façon dont vous mangiez, les choses qui vous faisaient rire. Faire une blague qu’il avait pas trouvé drôle, et me dire que toi t’aurais ri en sacrament. Pu parler parce que ça servait à rien s’il riait pas. Essayer d’être un peu quelqu’un d’autre, pour voir si ça aiderait. Une genre de gêne qui perdurait pis, après une couple de mois, pas comprendre pourquoi ma relation avec lui était encore froide.

« Maman, j’suis conne. »

Ma mère qui avait faite des kilomètres pour venir me raisonner. Me dire de t’oublier. Me rappeler que je t’avais tout donné pis que je pouvais pas continuer à faire ça pendant que t’étais même pas là pour recevoir. Maman qui avait de la peine pour moi quand je pleurais à l’entente de ton nom.

« Voyons, arrête d’attendre après lui. »

Fuck. Fuck. Fuck. Fuck.


En boule dans mon lit. J’hésitais à te débloquer. Te débloquer pour te dire les choses que j’avais pas eu le temps de te dire, des trucs que j’avais pas encore réaliser dans l’temps. Quand j’étais pas capable de m’avouer que j’étais en dépression, pis que la dépression ça fait faire des trucs weirds.

Je voulais m’excuser de pas avoir été une meilleure personne. Je m’excusais de pas avoir été une meilleure blonde. Je m’excusais d’avoir été un moi qui m’était inconnu aujourd’hui. C’tait dur être au courant de ce qu’on ferait différemment. Je t’aurais moins pris pour acquis, je t’aurais dit plus souvent que je t’aime. J’aurais profité des spasmes que t’avais en dormant, pis de la façon dont tu disais mon nom.

J’haïssais ça oublier le son de ta voix. Je commençais à pu me rappeler de comment tu parlais. De comment tu prononçais. J’oubliais tranquillement la texture de ta peau, la sensation de ta main sur mon corps. C’était effrayant d’oublier nous. Je dis tranquillement mais c’était une éternité qui passait trop vite. J’avais l’impression qu’on s’était vu hier. J’étais encore pas capable de concevoir qu’y fallait pas je t’appelle le matin pour te réveiller. Comment tu faisais pour pu me parler? Comment toi tu faisais pour pas te demander comment j’allais, comment tu faisais pour être capable de pu me voir? Ça me faisait sentir tellement laitte pis j’arrêtais juste pas de me répéter que c’était certain que tu m’avais jamais aimé pour être capable de me laisser comme ça.

Dans le néant.

Sans réponse. Sans répit. Je t’avais bloqué pour te donner un break, je trouvais ça tellement niaiseux de bloquer mais c’était comme vital à ma personne de savoir si t’allais finir par reach. C’était vital pour moi que t’en sache aussi peu sur moi que j’en savais sur ta vie d’été tout seul. Je t’avais bloqué parce que ça faisait mal comment tu me parlais comme avec une inconnue. Mais comment tu faisais pour vivre ta vie sans nous. C’tait comment vivre sans moi? Est-ce que ça faisait du bien? La vie était tranquille? À qui tu parlais quand ça allait pas, à qui tu parlais tous les jours? M’avais-tu remplacée? J’étais-tu facile à remplacer? Te rappelais-tu du son de ma voix? M’aimais-tu encore un peu.

Grosse claque dans ‘face. Reviens-en esti. Essayer d’arrêter de brailler comme un bébé de cinq ans, calmer mes soubresauts en me fixant dans le miroir. Voyons donc. Relaxe. Pu capable de reprendre mon souffle. Vraiment gênée de devoir prendre mes pompes parce que penser à toi me faisait manquer d’air dans les poumons. Me sentir conne. Grande respiration.

Direction rue Sherbrooke.


L’automne. La saison préférée de tout le monde.

Le retour des nuits courtes, des cafés brûlants, des beaux foulards qui contrastaient la veste en jeans pis du hashtag sweater weather. Les feuilles ambre comme mes gougounes Juju que je m’entêtais à porter même s’il commençait à faire frette pis d’autres un peu plus bourgogne qui commençaient leur apparition dans les branches. Le soleil encore chaud des fois. J’étais contente de mettre mes robes de côté pour enfiler une bonne paire de pantalons, j’étais contente d’avoir encore quelqu’un chez qui dormir.

Il était un peu une matriochka ou ben un mirage. Je pensais qu’il était une étendue d’eau potable finalement c’était juste beaucoup de sable. Phénomène optique lié un peu à ses mensonges qui donnaient l’illusion qu’on allait être bien ensemble. J’ai jamais eu autant de tics nerveux qu’avec lui, mon corps m’envoyait des signes ben flashs mais je me trouvais trop smart pour partir.

Y’était trop toute pis pas assez ce dont j’avais besoin. Mon cerveau qui glitch.

Un équilibre qui penchait d’un bord, le sablier commençait à manquer de temps.

L’automne à contre-courant.

On se criait des je t’aime pour camoufler que ça marchait pas tant, on se garochait des m’ennuie pour être sûr de pas finir tout seul à la fin de la journée. Se lancer des mots doux, s’écrire des compliments au scalpel.

Candy, le film.

Ma quête de vouloir tout réparer, même quelqu’un. Mon cœur trop grand qui était pas capable de refuser quelqu’un dedans. Mon cerveau qui voulait tout régler les problèmes des autres pour éviter de faire face aux siens. Mon nouveau projet en attendant l’hiver était devenu quelqu’un qui me faisait un peu mal sans trop s’en rendre compte. Boire, boire, boire. Des gorgées de Corona pour faire passer les mots qu’on avait de la misère à digérer. Se chicaner. Mes premières chicanes, mes premières batailles. Je pouvais pas m’arrêter de penser qu’avec toi on se chicanait jamais. On en était jamais venus à se crier dessus toi pis moi, on était peut-être trop tranquilles. Lui, y faisait sortir un côté de moi que je connaissais pas. Je me sentais comme une actrice, toujours en train de me checker en POV pis de me dire ben voyons donc. Je jouais mon propre rôle dans le genre de série que j’aimais regarder quand j’étais jeune. Skins. Y’était Tony pis j’étais Michelle. Pas mon couple préféré. J’étais Sid, il était Cassie. Gueuler. Brailler. Être déçue. Recommencer.

S’aimer pareil.

Apprendre à s’aimer malgré toute. Malgré que j’étais pas vraiment là mentalement, que lui non plus dans l’fond.

Prendre mon rôle trop au sérieux des fois, j’avais toujours souhaité être comédienne. Je réalisais mon rêve de petite fille en m’intoxicant de ma nouvelle relation. American Dream.

J’haïssais comment il se peignait. Son linge. J’haïssais son rire pis son aise. Comment rien était grave quand ça y tentait, mais que toute pouvait vite devenir une montagne. J’haïssais le son de sa voix pis son corps en entier.

Pu capable.

Réessayer tout l’temps. Check-point. Mourir. Revenir. Essayer. Accepter.

Octobre, pumpkin spice latte, pumpkin spice toute. Muffins à la citrouille, laisser pourrir le fruit au complet sur le comptoir de la cuisine. J’étais sensée me déguiser en Suzy pis toi en Sam l’Halloween dernier, faire notre propre Kingdom. Le temps des fêtes qui passait trop vite à mon goût. Noël avait beau se rapprocher, j’avais jamais ressenti l’envie de mettre des tounes sur jésus. Les températures toutes fucked up anyway,

la terre mourrait pis je la comprenais donc.

Plus l’année avançait plus je remarquais ton absence partout. Je me consolais en me disant que la prochaine année ça allait être moins pire, j’allais déjà avoir toute vécue sans toi. Là c’était de tout revivre en te soustrayant de l’équation, tout refaire moi-même. Noël sans toi, je l’avais appréhendé en criss ce moment-là. Me demander comment ça se faisait que tu me souhaitais pas Joyeux Noël. Demander à ma sœur si je devrais te texter. Laisser faire. Pas t’appeler non plus. Regarder ma famille, souhaiter qu’ils me demanderaient pas t’es rendu où. Me cacher dans les toilettes pour verser quelques larmes qui font chier. Vouloir me coller, mais être accompagné par mon pire ennemi qui arrive mal à cacher son envie de crisser son camp.

Regarder chaque pièce pis me souvenir qu’on était nos bouées dans les partys. Qu’on allait souvent prendre l’air dehors pour se replacer les idées, pour se crinquer avant de refaire face au monde. Se cacher dans les pièces vides pour s’embrasser. Jaser pendant des heures sans s’en rendre compte. Toi pis moi assis ensemble sur chaque divan. Moi pis toi qui s’aidaient à finir nos assiettes trop remplies. Me rappeler de toi partout, me sentir mal d’avoir chocké le dernier souper de Noël de ton bord. Être reconnaissante que tu venais à tous les miens. Vouloir te dire merci mais pas savoir comment.

T’écrire une lettre que j’allais mettre sous ta porte.

Dix, neuf, huit, sept, six, cinq, quatre, trois, deux, un.

Bonne année.

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